« Quinquagénaire fringant cherche nouveau départ »

Carole Couvert et Jérôme Dedeyan

Carole Couvert : présidente d’honneur de la CFE-CGC
Jérôme Dedeyan : Associé ERES

La participation aux bénéfices a été créée en 1967, elle a donc cinquante ans cette année. Elle a pris depuis une place décisive, aux côtés de l’intéressement, dans les mécanismes de partage du profit. Elle représente chaque année 6 milliards d’euros distribués à 4,5 millions de salariés du secteur privé, soit un montant de 1.300 euros.

Si l’on y ajoute la totalité des flux d’épargne salariale (intéressement et abondement dans les plans d’épargne), ce sont en moyenne 2.300 euros qui associent chaque année près de 7 millions de personnes à la performance de leur entreprise. Notre quinquagénaire se porte donc bien mais a besoin d’un nouveau départ dans la vie.

La participation aux bénéfices, obligatoire à partir de 50 salariés, est en effet insuffisamment développée dans les TPE et PME. Le taux d’équipement en épargne salariale n’est que de 17 % en dessous de 50 salariés alors qu’il est de 72 % entre 50 et 499 salariés, et de 92 % au-delà.

Elle manque souvent sa cible en n’étant qu’un flux financier et pas un outil d’information et d’association à la bonne marche des affaires.

Elle pourrait alimenter plus et mieux une épargne longue finançant l’économie productive, notamment en la réinjectant dans le financement des TPE/PME.

Enfin, les fonctions publiques ne sont pas couvertes.

La France a plus que jamais besoin de compétitivité pour que sa croissance génère à la fois les créations d’emplois garantissant notre lien social, et les ressources permettant le financement de notre sécurité, de nos infrastructures et de notre protection sociale. La participation est l’outil par excellence pour y contribuer.

Elle est collective, pédagogiquement efficace et financièrement utile. Elle peut mobiliser les énergies pour faire grandir nos entreprises, nos services publics et leurs projets. Comment ?

Il faut d’abord étendre son périmètre. Lorsqu’il y a profit, il devrait y avoir systématiquement partage du profit, et ce dès le premier salarié. Et une extension aux fonctions publiques sous forme d’intéressement alignerait tous nos concitoyens au service du pays.

Moderniser ensuite sa formule, obsolète, pour la réaligner avec la réalité économique. Le résultat fiscal, assiette de calcul de la participation a aujourd’hui divergé avec la réalité du profit généré par les entreprises, et est parfois source d’optimisation. Le passage au résultat comptable, assorti d’une période de transition serait plus juste. Pour les services publics, sa formule devrait être assise sur des critères de qualité de services et d’efficacité discutés avec les partenaires sociaux.

Il faut mieux la diriger aussi vers le financement de l’économie productive. C’est aisé si on revient sur la possibilité de la percevoir immédiatement et si, en supprimant le forfait social, on renforce l’attractivité du placement en actionnariat salarié et en épargne retraite, largement investie en fonds propres de nos entreprises.

Accompagner le flux financier d’un flux d’information sur la marche des affaires. A chaque versement, en communiquant une information synthétique sur les comptes de l’exercice et sur les perspectives de l’entreprise ou de l’entité publique concernée par l’accord collectif de participation ou d’intéressement, on réinstallerait la vertu première de la participation.

La participation aux bénéfices est l’instrument d’une gouvernance « gagnant-gagnant », plus humaine, dans laquelle chacune et chacun est associé(e) aux résultats de l’entreprise ou de son administration.

Alors offrons un nouveau départ dans la vie à notre sémillante quinquagénaire, notre pays se portera mieux !